Aujourd’hui ne fermez pas votre cœur

Dans la 1ère lecture (Ex 17, 8-13), on voit pendant la marche au désert le peuple élu se faire attaquer par les Amalécites, de façon odieuse selon Moïse dans le Livre du Deutéronome : « Souviens-toi de ce que t’a fait subir Amalec, sur la route, quand vous êtes sortis d’Égypte. Il t’a rejoint sur la route et a massacré tous ceux qui traînaient à l’arrière, alors que tu étais fourbu, exténué. Il n’a pas craint Dieu ! » (Dt 25, 18).

Moïse envoie Josué mener le combat, qui est un juste combat. Josué est le fils spirituel de Moïse. Il prendra sa suite dans le Livre de Josué dont la tradition chrétienne a fait le symbole du combat spirituel : pour nous le véritable ennemi est invisible. Ici, il est représenté par les Amalécites. Moïse monte sur la colline diriger la bataille. Il est entouré d’Aaron son frère et d’un dénommé Hour qui est, selon la tradition juive, son beau-frère, le mari de Myriam, sœur de Moïse et Aaron.

Il y a un autre Hour dans la Bible : fils de Caleb, fils de Esrom, fils de Pharès, fils de Juda, des noms qui sont dans la généalogie d’ouverture de l’évangile de saint Matthieu : « Juda, de son union avec Thamar, engendra Pharès et Zara, Pharès engendra Esrom, Esrom engendra Aram » (Mt 1, 3). Esrom engendra également Caleb et Caleb, à la mort de sa femme Azouba, épousa Éphrath qui lui enfanta Hour (1 Ch 2, 19).

Caleb, père de Hour, est l’un des douze éclaireurs que Moïse envoie en avant explorer le pays de Canaan (Nb 13) et le seul avec Josué à se réjouir quand les dix autres estiment que ce pays, la Terre promise, est impossible à conquérir : « Tous les hommes que nous y avons vus sont de très haute taille. Nous y avons même vu des géants, des fils d’Anaq, des descendants de géants. À côté d’eux, nous avions l’air de sauterelles, et c’est bien ainsi qu’ils nous voyaient » (Nb 13, 33). 
C’est le sentiment que ressent quiconque plonge dans l’histoire des Saints et de la spiritualité chrétienne : un voyage au pays des géants !

Nous sommes des sauterelles devant les géants de l’histoire de la Sainteté.

C’est pourquoi ce récit de la bataille contre les Amalécites est si rassurant, pour ne pas compter sur nos seules forces et nous faire grandir en humilité. 

Moïse est sur la colline, le bâton de Dieu à la main, avec lequel il vient de frapper le rocher pour donner à boire au peuple assoiffé (c’est le début de ce chapitre 17 de l’Exode), signe que, s’il peut sortir de l’eau d’un rocher, combien plus d’un cœur endurci, un cœur dur comme de la pierre, il peut sortir un geste de charité : c’est la leçon de l’évangile de ce dimanche, le geste de ce juge au cœur endurci qui finit par faire justice à la pauvre veuve. 

Moïse est sur la colline et il tient la main levée, la ou les deux mains levées (pour les Pères de l’Eglise, il avait ‘les bras en croix’ !), en signe d’intercession pour soutenir le peuple dans son combat : « Quand Moïse tenait la main levée, Israël était le plus fort. Quand il la laissait retomber, Amalec était le plus fort ». Levez vos mains vers Dieu pour prier et voyez combien de temps vous pouvez tenir … « Les mains de Moïse s’alourdissaient ! ».

Aaron et Hour mettent une pierre derrière lui, le font asseoir, et se placent de chaque côté pour soutenir ses bras. C’est ainsi qu’ils remportèrent le combat. Nous ne sommes jamais seuls dans la prière.

Quelle est cette pierre sur laquelle Moïse prit place ?

Le Seigneur, mon rocher, mon salut ! 

Elle représente aussi l’Eglise, du nom que Jésus a donné au premier de ses Apôtres : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle » (Mt 16, 18). Immortelle, grâce à Dieu ! Immortel quiconque demeure dans le Christ, même s’il a prévenu : « Dans le monde, vous avez à souffrir, mais courage ! Moi, je suis vainqueur du monde » (Jn 16, 33).

Vous en doutez ? Vous doutez de la victoire du Ressuscité ? Vous n’espérez pas sa venue dans la Gloire ?

Dans les premiers temps de l’Eglise, certains croyaient cette venue imminente. Il va venir le Seigneur ! L’évangile ne dit-il pas que Dieu va « faire justice à ses élus, qui crient vers lui jour et nuit ? Les fait-il attendre ? Je vous le déclare : bien vite, il leur fera justice ». Sauf que ‘bien vite’ ne signifie pas ‘dans peu de temps’ : ‘bien vite’ signifie ‘en un éclair’. L’expression n’apparaît qu’ici dans l’évangile de saint Luc mais trois fois dans les Actes des Apôtres où elle a clairement ce sens de l’instant  (voir Ac 12, 7 et Ac 22, 18). En un instant !

Jésus l’a affirmé dans le chapitre qui précède : « Tout comme l’éclair resplendit et brille d’une extrémité du ciel à l’autre, ainsi sera le Fils de l’homme dans son jour » (Lc 17, 24). La fin du monde viendra en un éclair. 

Dieu l’a promis par les prophètes, que ce soit Jérémie, « J’agirai en un clin d’œil, je ferai déguerpir vos ennemis » (Jr 49, 19 ; Jr 50, 44), ou Isaïe : « Le plus petit deviendra un millier, le plus chétif, une nation puissante. Moi, le Seigneur, en temps voulu, j’agirai en un éclair » (Is 60, 22). 

Nul n’en sait le jour et l’heure (Mt 25, 13) mais la fin du monde viendra en un éclair. Dieu fera alors justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit. 

Comme l’écrivait un éminent religieux du 12ème siècle (le bienheureux Guillaume de saint Thierry, proche de saint Bernard de Clairvaux) : « L’Esprit souffle où il veut et quand il veut … Mais il est au pouvoir de l’homme d’y préparer son cœur ».

« Aujourd’hui ne fermez pas votre cœur, 
mais écoutez la voix du Seigneur ».

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