Dieu est communion

Il m’arrive d’entendre de la part d’un couple, de fiancés ou marié, qu’il se considère comme une équipe, une bonne équipe, et je sursaute, même si on voit bien ce qu’ils veulent dire avec cette image qui appartient autant à l’univers professionnel qu’à celui du sport. Il n’est pas sûr qu’un couple soit une équipe et cela n’est pas dû au fait qu’ils ne soient que deux. Tout dépend du terme, de la fin qu’on lui assigne puisque c’est la définition de la persévérance à laquelle le Christ nous exhorte : aimer jusqu’au bout. Le Christ nous a aimés jusqu’au bout.

Le Pape Léon a livré une homélie vraiment mémorable le 15 juin dernier pour le Jubilé du Sport au Dimanche de la sainte Trinité, reconnaissant que « le binôme Trinité-sport n’est pas vraiment courant, et pourtant cette association n’est pas déplacée ». Comme ce dimanche le binôme eschatologie (évangile sur la fin des temps) – journée mondiale des pauvres.

Il avait expliqué que « toute bonne activité humaine porte en elle un reflet de la beauté de Dieu, et le sport en fait partie ». Le mariage aussi. 

Il avait surtout rappelé que « Dieu n’est pas statique, il n’est pas fermé sur lui-même : Dieu est communion, relation vivante entre le Père, le Fils et le Saint-Esprit, qui s’ouvre à l’humanité et au monde. La théologie appelle cette réalité périchorèse, c’est-à-dire “danse”, une danse d’amour réciproque. C’est de ce dynamisme divin que jaillit la vie ». 

Il avait défini trois aspects qui font du sport un moyen de formation humaine et chrétienne. D’abord, « dans une société marquée par la solitude et l’individualisme, le sport – surtout d’équipe – enseigne la valeur de la collaboration, du cheminement commun, de ce partage qui est au cœur même de la vie de Dieu ». Il en va de même pour le couple de l’homme et de la femme. Dieu est communion.
Deuxièmement, « dans une société de plus en plus numérique, où les technologies, tout en rapprochant les personnes éloignées, éloignent souvent celles qui sont proches, le sport valorise le caractère concret du vivre ensemble, le sens du corps, de l’espace, de l’effort, du temps réel ». Il en va de même du couple. Dieu est communion.
Enfin, « dans une société compétitive où il semble que seuls les forts et les gagnants méritent de vivre, le sport enseigne aussi à perdre, en confrontant l’homme, dans l’art de la défaite, à l’une des vérités les plus profondes de sa condition : la fragilité, la limite, l’imperfection ». Il en va de même du couple où aucun des deux ne peut faire l’économie de ses fragilités, de ses limites, de ses imperfections. Et de la nécessité du secours divin. Dieu est communion.

Alors pourquoi un couple ne serait-il pas une équipe qui gagnerait à apprendre des sportifs « l’expérience de la fragilité qui ouvre à l’espérance ». 
« L’athlète qui ne se trompe jamais, qui ne perd jamais, n’existe pas. Les champions ne sont pas des machines infaillibles, mais des hommes et des femmes qui, même lorsqu’ils tombent, trouvent le courage de se relever ». 
Et le Pape Léon rappelait que « saint Jean-Paul II disait que Jésus est ‘le véritable athlète de Dieu’ parce qu’il a vaincu le monde non par la force, mais par la fidélité de son amour ». Maintenant son amour à ses disciples qui s’étaient enfuis au moment de sa Passion. Et tout au long de l’histoire à ceux qui l’abandonnent sous la pression et les persécutions.

L’évangile de ce dimanche, le discours eschatologique de Jésus sur la fin des temps apporte une réponse : le couple uni devant Dieu est appelé à porter un témoignage, mener un combat qui engage toute l’humanité. La question lui est posée avant l’échange de consentements : « Etes-vous disposés à assumer ensemble votre mission de chrétiens dans le monde pour l’annonce de l’Evangile ? ».

Une amie juive a demandé à me voir parce qu’elle était tombée un dimanche sur la messe télévisée où le prêtre disait dans son homélie qu’il fallait pardonner : entendant cela, elle s’est rendue compte qu’il y avait des choses qu’elle n’avait pas pardonné à son mari. Il faut du temps pour pardonner. Une équipe n’a pas le temps : elle a une contrainte d’efficacité. Alors qu’un couple que dis-je l’amour est fondé sur la patience, la constance et la persévérance.
« L’amour prend patience, l’amour est bienveillant ». Ces deux mots ouvrent l’hymne de saint Paul à la charité, même si en français on dit ‘l’amour rend service’, mais pas en anglais ni en espagnol où on a gardé la bienveillance du latin, kindness en anglais. L’amour prend patience, l’amour est bienveillant : à l’égard des plus pauvres comme des plus lents.

Une autre amie, d’une grande vivacité d’esprit, professionnellement successful, m’a dit qu’elle allait se séparer de son mari, plus âgé, de plus en plus âgé et de plus en plus lent. ‘Il a toujours été comme ça’ lui ai-je dit. ‘Je n’en avais pas conscience’ a-t-elle répondu. Je me suis étonné de cette propension de certaines personnes vives et réactives à épouser des conjoints posés et sans doute rassurants. Pourquoi les hirondelles épousent-elles des laboureurs ?

Saint Paul dit qu’« il y a des gens dont les péchés sont manifestes avant même tout jugement ; chez d’autres, ils n’apparaissent que plus tard » (1 Tim 5, 24), peu après avoir mis en garde : « Si quelqu’un ne s’occupe pas des siens, surtout des plus proches, il a renié la foi, il est pire qu’un incroyant » (1 Tim 5, 8). En cette journée mondiale des pauvres, posons-nous la question : comment ceux d’entre nous qui en avons la possibilité et les moyens pourrions-nous nous occuper des plus pauvres si nous ne sommes pas capables de nous occuper des plus proches ? Où commence la patience, où finit la persévérance ?

Quand une personne vous semble un poids mort, demandez-vous si elle n’est pas votre Croix. 

Le Christ nous a aimés jusqu’au bout pour que nous découvrions la puissance de l’amour en nous unissant à Lui, c’est-à-dire à l’amour infini du Père et du Fils et du Saint-Esprit. 

Dieu est communion

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